Troisième édition des Matinales Fed Légal "le compliance officer doit-il être un business partner ?". Selon Guillaume Nonain, « si vous ne vous intéressez pas à la compliance, la compliance va s’intéresser à vous ». Au-delà de l’importance indéniable de la matière, il existe une réelle disparité dans l’organisation, le rattachement et l’activité même de compliance officer...

18 juin 2015 • FED Legal • 7 min

[MATINALE] Le Compliance Officer doit-il être un business partner ?

Troisième édition des Matinales Fed Légal : "le compliance officer doit-il être un business partner ?"


Selon Guillaume Nonain, « si vous ne vous intéressez pas à la compliance, la compliance va s’intéresser à vous ».
Au-delà de l’importance indéniable de la matière, il existe une réelle disparité dans l’organisation, le rattachement et l’activité même de compliance officer.
C’est la question de l’interaction de la compliance avec la direction juridique et avec le business que nous avons souhaité aborder lors de cette Matinale. 

1. Définition et origines de la compliance


La création de la compliance résulte d’une obligation légale ou réglementaire, qui elle-même fait très souvent suite à un scandale financier ou une crise judiciaire.
Comme Sarbanes-Oxley et les scandales financiers d’Enron et Worldcom.

Cette matière née d’ « accidents » est donc très hétéroclite, et difficilement comparable d’une entreprise à une autre, leur maturité culturelle face à la compliance étant fortement liée à leur secteur d’activité.

Pierre Laporte estime que « la compliance est l’ensemble des règles et des normes auxquelles l’entreprise doit se conformer pour que son activité soit pérenne […], c’est un facilitateur du business ».

Il existe un réel flou sur la notion de compliance, tant sur son activité quotidienne que sur son impact dans l’entreprise.



2.    Comment la compliance est-elle incarnée ?

  • Caractéristiques du compliance officer


La compliance en entreprise revêt 3 phases mises en lumière par nos intervenants : 
-    La première est celle de l’élaboration de la politique compliance. Il est important lors de cette « création » d’être au plus proche des problématiques business. L’efficacité du programme à mettre en place dépendra de la bonne compréhension des enjeux quotidiens. 

-    La seconde étape est celle de la formation des équipes opérationnelles sur ces règles de compliance.
C’est lors de cette phase que le juriste intervient le plus souvent, étant garant de la bonne mise en œuvre des mesures légales et réglementaires.

-    La troisième phase est celle de contrôle, qui requiert un certain recul face au business, ce que possède l’audit, afin de garantir une vraie indépendance.

Ces temps forts marquent les trois caractéristiques indispensables pour un compliance officer : compréhension du business, pédagogie et indépendance.
Selon Pierre Laporte, « le cumul des rôles de conseil et de contrôle/sanction risque d’aboutir à une schizophrénie », le juriste ne devant de fait intervenir que sur la première partie.

  • Quel positionnement pour une efficacité optimale de la compliance


Pour 63% des directeurs juridiques, il est évident que la compliance doit leur être rattachée.

Compte-tenu des disparités culturelles en la matière, le rattachement du compliance officer varie : si la direction juridique (37%) semble être le premier patron, la direction générale et ses différentes instances (secrétariat et direction générale, présidence) encadrent les compliance officers dans 45% des cas.

L’enjeu du rattachement de compliance, au-delà de l’efficacité de cette dernière, réside dans la prise de pouvoir ou le marketing interne de la direction en question. Nos participants étaient tous d’accord pour dire que la compliance est une matière de gouvernance d’entreprise. A ce titre, elle doit avoir sa voix au comité exécutif.

Pour beaucoup, la compliance est le lien entre les directions juridique, financière, des risques et générale.

  • Quelle impulsion pour la compliance ?

La compliance, partie prenante de la gouvernance d’entreprise, requiert au-delà de son application quotidienne, une impulsion pour bénéficier d’un réel rayonnement en interne. De l’avis de tous nos invités, qu’ils viennent du secteur bancaire, pharmaceutique ou des services, la compliance ne peut avoir de moteur que la direction de l’entreprise.

Puisque son existence même est liée à une responsabilité pénale, celui ou celle qui porte cette responsabilité doit être l’instigateur et référent (indirecte à défaut) de la compliance. Le compliance officer est par conséquent le partenaire du représentant pénal de la société.
A titre d’exemple, dans les milieux financiers, les compliance officers présents se positionnaient beaucoup plus comme partenaires de la direction générale que comme celui du business.

Or Guillaume Nonain estime que « la compliance ne doit pas être totalement déconnectée du business ».
Les directeurs juridiques présents lors de notre Matinale ont suggéré que le compliance officer puisse partager cette responsabilité pénale, non pas dans un souci de répression mais plutôt de bon équilibre entre décisionnaire et auditeur.

S’il est indéniable que le complance officer doit être un business partner dans le cadre de la création de la politique compliance, il se doit d’être inflexible lors de sa mise en application.


3. Marché et perspectives

  • Formation

De plus en plus de doubles cursus permettent de former les compliance officers : droit et international avec les LL.M, et droit et finance ou école de commerce.

L’empreinte du secteur financier est ici assez forte.

C’est ainsi qu’ont été créés plusieurs Masters spécialisés au sein de différentes universités : « juriste sécurité financière / compliance officer » à Strasbourg, « Contrôle des risques bancaires, sécurité financière et conformité » à Paris I (et un similaire à Caen) ou encore « Droit pénal financier » et « Droit et Ethique des affaires » à Cergy-Pontoise.

La majorité des diplômés sont recrutés au sein de banques ou établissements financiers, alors que le reste occupe des postes de juriste droit des affaires avec (ou non) une composante compliance.

  • Secteurs

Le secteur de la finance est le premier employeur des candidats « compliance » rencontrés par Fed Légal.

Les services et l’industrie se partagent une moitié du marché.
Cela s’explique par la rigidité des normes et de la règlementation du secteur financier et par la maturité des compliance officers en interne. La banque est l’un des premiers à avoir imposé cette fonction.

La tendance tend à s’équilibrer, ce qui présage d’un certain potentiel de croissance pour l’industrie et pour les services.

  • Instantané du marché

65% de nos candidats ont au moins 7 ans d’expérience,
et sont venus à la compliance en seconde partie de carrière,
qu’ils viennent de la finance, de l’audit interne ou du juridique.

Par ailleurs, les profils moins expérimentés sont principalement recrutés par les banques.

Le marché a récemment fait preuve d’un vrai dynamisme : nous avons en effet multiplié par 2 nos recrutements sur le premier semestre 2015 par rapport à l’année 2014.

  • Perspectives

Au-delà d’une évolution verticale vers des postes managériaux en Compliance, nos échanges avec nos clients et candidats ont révélé deux types de perspectives :

-    la fonction juridique : la concurrence, les relations institutionnelles, le lobbying ou une fonction plus classique de juriste (structurel : corporate, assurance…)
-    la fonction de contrôle interne et financière, où une vraie disparité existe, liée au besoin de formation et de compétences techniques des candidats.
La compliance est une charnière qui ouvre ainsi des possibilités d’évolution diverses.